07/05/2025 reseauinternational.net  3min #277108

Cartes du monde : comment les projections géographiques influencent notre perception des pays

par Nouvelle Aube

La projection de Mercator avait été conçue pour faciliter la navigation maritime,
en conservant les formes des continents mais au prix d'un important biais de
surface. Ainsi, le Groenland apparaît plus grand que l'Afrique, alors qu'en
réalité le continent africain est 14 fois plus vaste.

La manière dont nous voyons le monde sur une carte peut profondément influencer notre perception des rapports de force géopolitiques.

C'est ce qu'explique Donald Houston, professeur à l'université de Birmingham, qui alerte sur l'impact des différentes projections cartographiques dans la représentation des continents et des pays.

La projection de Mercator, développée au XVIe siècle par Gerardus Mercator, reste aujourd'hui la plus répandue dans les écoles, les journaux et les médias. Pourtant, cette carte agrandit considérablement les pays proches des pôles - comme l'Europe, la Russie ou les États-Unis - tout en réduisant la taille réelle des pays situés autour de l'équateur, notamment en Afrique, en Amérique latine ou en Asie du Sud.

Une distorsion des tailles à des fins historiques

La projection de Mercator avait été conçue pour faciliter la navigation maritime, en conservant les formes des continents mais au prix d'un important biais de surface. Ainsi, le Groenland apparaît plus grand que l'Afrique, alors qu'en réalité le continent africain est 14 fois plus vaste.

«Cette carte est complètement trompeuse, car elle donne l'impression que les pays riches du Nord sont plus grands et donc plus importants», déclare Donald Houston.

En parallèle, la projection de Peters, utilisée notamment par l'ONU, tente de corriger ce biais en restituant fidèlement les surfaces réelles des pays. Mais elle déforme fortement les formes et les angles, rendant la lecture moins intuitive, ce qui pousse certains à la juger «fausse».

Une vision géopolitique du monde

Selon Houston, les choix de projections cartographiques ne sont pas neutres. Ils ont pu être influencés - consciemment ou non - par des visions colonialistes ou impérialistes, en plaçant systématiquement l'Europe au centre ou le Nord en haut de la carte.

«Il n'y a aucune raison scientifique pour que le nord soit toujours en haut», ajoute-t-il. «Des cartes pourraient très bien montrer l'Afrique en haut, ou le Pacifique au centre».

Des alternatives existent, comme la carte dessinée par le géographe Muhammad al-Idrisi en 1154, où le sud est en haut, mettant la péninsule arabique au centre. De même, la carte chinoise de Matteo Ricci (1602) place la Chine au centre du monde, conformément à sa vision impériale de l'époque.

Aucune carte plate ne reflète fidèlement la réalité

Houston rappelle qu'aucune carte en deux dimensions ne peut représenter la Terre de façon parfaitement exacte. Seul un globe terrestre sphérique permet de restituer fidèlement les proportions et distances.

«Il est crucial de préciser que les cartes planes reflètent soit la forme, soit la taille, mais jamais les deux à la fois», explique-t-il.

Une perception influencée par les cartes : l'exemple du Groenland

Le professeur revient également sur l'intérêt manifesté par Donald Trump en 2019 pour l'achat du Groenland, qu'il avait qualifié d'«île géante».

«Peut-être que Trump sera surpris en découvrant la vraie taille du Groenland», ironise Houston, qui relie ce projet davantage à un intérêt stratégique et minier qu'à une illusion cartographique.

source :  Nouvelle Aube

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